Ôde au poil

Modérateurs : MJs, MJs Baie

Répondre
Déclamation sur la place du village

Ôde au poil

Message par Déclamation sur la place du village »

Sur la place du village de Boisdoré, un petit barde grimpe sur un tonneau, et sans se soucier de ce que pourrait penser le chaland, entreprend de se déshabiller, au vu et au su de tous !

Il ôte le haut de son vêtement, mais a tout de même la décence de conserver son pantalon. Ce petit bout d'homme aux oreilles pointues, au regard oblique, au dos bossu qui n'est plus dissimulé aux yeux de chacun, au chapeau enfoncé de guingois sur la tête, est également remarquable par l'impressionnante toison qui orne son torse : une forêt de poils sagement ordonnée, qui pointe également sur les épaules, et commence à s'étendre sur la bosse.

"'Le poil' est le titre du poème qui suit,
Que je m'en vais conter pour tromper votre ennui."

N'ayant cure de savoir si quelque regard de travers se pose sur lui, le barde écarte les bras, et entonne d'une voix étonnamment puissante pour un si petit être.

"Au creux de mon nombril, mon préféré se niche,
Aggloméré avec quelques fibres laineuses."


Le barde saisit dans son nombril une peluche de poils, qu'il hume délicatement, son visage exprimant une profonde extase.

"Imbibée de sueur, odorante et soyeuse,
Que j'aime extraire cette précieuse bouliche !"


Le barde délaisse alors sa peluche, et fronce les sourcils de manière exagérée, prenant ainsi une expression contrariée bien visible malgré son grand chapeau.

"Je déteste au contraire celui qui toujours
Se coince entre mes dents en plein effort bucal..."


Le barde interrompt sa diction, et fait mine de retirer d'entre deux dents un poil fictif qu'il brandit devant l'assistance.

"... Forçant l'interruption de ce plaisir labial
Pour aller extraire ce petit tue l'amour !"


Jetant au loin le fictif impétrant, le barde prend alors une pose héroïque, les mains posées sur les hanches, un pied en avant sur le rebord du tonneau.

"Ma fierté est mon chef, long de dix centimètres,
Qui fièrement s'érige sur mon téton droit !"


Illustrant son propos, le barde saisit effectivement un poil, bien réel celui-ci, qu'il tire doucement, prenant garde de ne pas l'arracher par mégarde. Ceux qui se tiennent assez prêt peuvent apercevoir ce poil, qui est à vrai dire de belle taille.

"Sur mon torse velu, c'est lui qui fait la loi,
Et sur des milliers de troupes il règne en maître !"


Le barde lâche son poil, et se lisse délicatement le torse au niveau du téton droit, afin de lui faire reprendre sa place. Il saisit alors le bord de son chapeau, le soulève d'un geste, et le jette à terre devant le tonneau, dévoilant ainsi une crinière aussi hirsute que ses poils sont dociles.

"Sur mon crâne se dresse un parc d'attractions
Où s'ébattent gaiement non seulement des poux..."


D'un geste ample, le barde passe fièrement sa main sur son torse, du cou jusqu'au bord de son pantalon.

"... Mais aussi, grâce au pont entre pubis et cou,
Leurs cousins facétieux que sont les morpions !"


Le barde écarte les deux bras, les paumes grandes ouvertes, dans un geste grandiloquent exprimant la fierté sans borne qu'il éprouve à arborer de la sorte son torse velu.

"Ces poils qui me couvrent dans ma totalité
Sont les meilleurs témoins de ma virilité !"


Achevant ainsi son ôde au poil, affichant un grand sourire satisfait, le barde s'incline en secouant devant lui un chapeau imaginaire, le sien étant toujours à terre, au pied du tonneau, attendant peut-être l'obole d'un spectateur amusé par le poème.
Aidann
Messages : 60
Enregistré le : 17 janv. 2010, 17:07

Re: Ôde au poil

Message par Aidann »

C' est du grand art, vraiment ! En voilà un texte au poil et pas si tiré par les cheveux que ça ! :D
"Some men see things as they are and say 'Why ?' I dream things that never were and say " Why not ?' " - Martin Luther King
Willy Folkhor
Messages : 101
Enregistré le : 14 août 2009, 19:37
Localisation : NIsère (ou pas loin)

Re: Ôde au poil

Message par Willy Folkhor »

Des gens de diverses conditions entraient et sortaient du temple avec dans les jambes toute la célérité de l'instant décisif. Laborieux, tous semblaient savoir avec certitude vers quelles tâches cette course les poussait. Celles-ci devaient revêtir une importance qui confinait à la nécessité absolue, vue l'ombre de chaude détermination qui couvrait leurs traits.

Pourtant, l'un d'eux s'arrêta avec un amusement croissant à mesure que l'ode était déclamée. Ce dernier, hobbit de son état, profita de ce charmant - et si délicatement illustré - exposé pour ajouter avec éclat :

" T'manqu'plus qu'du poil aux pieds, et tout serait parfait ! "

La rime n'était certes pas de toute première qualité... L'alexandrin non plus... Mais le hobbit ne s'arrêta pas à ces considérations bien philosophiques ! Filant en riant comme un gamin heureux de sa plaisanterie, il s'en alla accomplir cette tâche qui pressait tant !
Répondre