Un chant sur la place...

Forum En Jeu de la Cité de la Baie.
Annonces des crieurs, rumeurs, évènements particuliers,
venez poster ici vos messages Roleplay.

Modérateurs : MJs, MJs Baie

Répondre
Aenor
Messages : 38
Enregistré le : 11 mars 2010, 23:08

Un chant sur la place...

Message par Aenor »

Une frêle silhouette s’avança, d’un pas visiblement décidé, sur la place de la cité. Une jeune femme à la peau diaphane et aux cheveux sombres éparpillés sur ses épaules marchaient, un violon à la main, tôt suivie d’un écuyer portant les armoirie des Brumes. Les couleurs du castel et le manque évident d’exposition au soleil des protagonistes ne pouvaient signifier qu’une chose : que ces nouveaux arrivants étaient brumois, et qu’ils avaient dû séjourner ces derniers temps dans leur pays d’origine !

Bien que son pas fut rapide, le regard de la jeune troubadour (car il semblait assez évident qu’elle en fut une) se perdait dans le décor qui entouraient le cœur de la cité. Ses yeux pâles scrutèrent les imposantes bâtisses, les hauteurs de la cité baignées par le soleil, puis la fontaine centrale de la place. Elle manqua à plusieurs reprise de trébucher (il n’est en effet guère aisé d’avancer ainsi sans regarder où l’on met les pieds), mais ne quitta sous aucun prétexte son ardente contemplation. Elle ne semblait pourtant pas découvrir ce lieu, mais davantage le retrouver avec une joie teintée de mélancolie.

Nippée dans des habits de voyage un peu usés, elle s’arrêta non loin de la fontaine. Quittant enfin ses retrouvailles émues avec le paysage, elle salua avec respect les personnes qui se tenaient là. Il semblait qu’elle avait grande envie d’engager la conversation (elle n’était point barde pour rien, cela ne faisait pas de doute), mais qu’une aspiration encore plus pressante dominait alors ses mouvements. Immobile, elle entreprit alors de se défaire du capuchon pourpre qui nimbait ses épaules. Elle posa délicatement le vêtement sur le bord de la fontaine, et prit une profonde inspiration… Elle se mit alors à caresser du bout des doigts le beau violon aux couleurs des Brumes qu’elle tenait délicatement en ces mains fines, comme s’il fut le plus grand des trésors. Attendant quelques minutes, elle regarda la foule des badauds se presser sur la place. Avaient-ils remarqué sa présence ? Impossible de le savoir, mais le manège de la jeune femme à l’allure étrange ne pouvait que troubler les paisibles scènes qui se déroulaient habituellement ici.

Prestement, mais avec une grande douceur, elle saisit l’archet de son violon. Des notes s’élevèrent alors, d’abord fragiles et douces, puis se délièrent en de magnifiques accords. Mélancolie ? Joie du retour ? Difficile de déceler ce que signifiaient véritablement ces notes.
Elle aperçut alors la chouette blanche… elle adressa une respectueuse révérence à l’encontre de l’animal, les notes s’interrompant quelques instants. Puis la musique reprit, à destination de tous ceux qui se trouvaient là, occupés à leurs tâches quotidiennes.

Enfin, la voix de la jeune femme s’éleva. Cristalline dans l’air gorgé des parfums de la cité blanche, elle s’échappa des lèvres de la ménestrelle comme s’il c’eût agi d’une libération. Sur son visage, se pouvait lire une joie intense… Nul doute qu’elle n’avait point palabré avec les muses depuis longtemps. Trop longtemps à son goût, qu’elle n’avait point pu chanter.

« Ignorez-vous ce que l’on trouve dans les tréfonds de BrumeVent ?
Croyez-vous que de par ces terres, seule la beauté ait un empire ? »

Elle invectivait presque les passants, mais ce manège prêtait plutôt à rire, tant le visage de la jeune femme peinait à se soustraire à sa grande douceur. Elle reprit, comme si elle contait un récit merveilleux, un conte empreint de mythe que les vieux racontent lors des veillées.

« Les errances pourtant, dissipent les mirages,
et je vais vous conter une péripétie,
qui troubla tôt les Brumes d’un pernicieux orage,
et entacha leur art d’un bien sombre mépris

Il existe sur ces terres un atelier maudit
Privé de toute lumière et pétrifié d’horreur
Tant l’air est saturé des plus immondes odeurs
Que vous n’ayez humées dans toute votre vie

Les matières employées pour dessiner sa toile
A n’en point pouvoir douter sont artisanales…
Leur origine dégoute mais pourtant les tableaux
Dévoilent un génie, et confinent au Beau

Pourritures immondices, autant de répulsion,
Qui pourtant ne dissipent un brin d’admiration
Retenant votre souffle, jusqu’au bord du malaise
Votre contemplation est une violente ascèse

Le spectacle vous exalte autant qu’il vous accable
Longtemps pétrifié qu’un être humain ait pu
Déguiser de ses vices jusqu’au moindre retable
De taches d’Apocalypse, ou des scènes les plus crues

Où finit cette histoire ? A l’ombre d’un cachot
L’homme sans scrupule insulta le château
Laissant l’air pourrir dans ses murs empestant
Les toiles du génie qu’avait salies le sang… »


Conte brumois s’il en était, ou récit d’un vécu ? Dans tous les cas, ces mots s’élevèrent au cœur de la cité blanche, avant de se terminer dans un sourire de la jeune femme. Heureuse d’avoir de nouveau laissé résonner sa voix sur la place de la Baie.
Répondre