Un vieil homme courbé sur son bâton surveillait son petit fils qui jouait sur les berges du Mnevis tandis que les parents travaillaient aux champs à côté.
Perdu dans ses pensées il regardait l'eau défiler et sa voix érayé sortit de ses lèvres parcheminées en murmurant pour lui même.
"L'eau monte. Je le sens dans mes vieux os fatigués."
L'enfant ayant entendu le vieil homme leva la tête.
"Que dis-tu grand père ?"
"La crue du fleuve a commencé mon enfant. Avec elle arrive une période faste pour les habitants de Balamoun. L'eau monte et inonde les champs pour y déposer un limon fertile. C'est grâce à cela que l'on peut cultiver avec une abondance miraculeuse dans une contrée aussi désertique que la notre. Regardes. Au delà des champs après la limite de la montée des eaux il n'y a plus que du sable stérile. Il faut que tu comprennes que sans la crue l'on ne pourrait pas se nourrir et Balamoun n'existerai tout simplement pas. C'est pourquoi il faut rendre grâce à Hôrosis pour le don qu'il nous a accordé."
"Je sais tout ça grand père tu me l'as déjà expliqué. Je sais aussi que si la crue arrive ça veut dire que la fête de l'eau c'est bientôt.
Le vieil homme sourit de toute sa bouche édentée en regardant son petit fils. En son fort intérieur il savait que c'était la dernière crue qu'il verrait puisqu'il sentait de jour en jour ses forces l'abandonner. Sa mort était proche et inéluctable. Pourtant il partirait le cœur léger car il avait mené sa vie d'homme du mieux qu'il avait pu et que c'est avec joie qu'il irait retrouver son Père et Juge en son Royaume. Il était temps pour lui de laisser la place à une nouvelle génération. Lui le vieil homme cassé par le poids du labeur et des ans devait mourir tandis que son petit fils vivrait et s'épanouirait à son tour.
A l'image du fleuve qui s'écoulait sous leurs yeux tel était le cycle de la vie et de la mort, fait de crue et de décrue. Le limon venant de l'amont nourrissant l'aval.
"Oui mon petit, c'est bientôt la fête de l'eau. "