Quelques mots furent attrapés et lus d’une page déchirée et volante au milieu de la cité…

(Daté de Mai 2009)

Jour 1 :

« Je suis le survivant. Dernier citoyen et seul… Seul défenseur d’une ville autrefois de lumière que les ténèbres ont recouvertes, je ne compte plus les jours dans le noir. Ou est-ce les mois… Les rats sont les seuls amis qu’il vous reste lorsque la puanteur de la mort vient vous frotter les narines. Le dieu de la déchéance et de la puanteur a frappé, et les survivants, s’ils existent sont violés et empalés au nom de celui qu’ils appellent l’Unique… »
« J’entends leurs prières, j’entends leur soif et personne ne sait combien d’âmes sont déjà en leur possession, vouées à la souffrance éternelle de l’enfer… »
« Ou sont-ils ? Je ne les vois pas… Ceux censés nous protéger, payer de notre or, de notre sueur pour pouvoir prospérer. Leur couardise n’a d’égal que le nombre de morts qui s’empalent sur la place et déjà la fontaine de la Cité Blanche abreuve chacun de son flux écarlate. »
« Ce sont sans doute mes dernier mots, moi le seul, moi le dernier, moi le survivant… je maudis à jamais le fort et ses soldats en sécurité derrière leurs murailles, s’étouffant de repas insouciants et de la chaleur de leur graisse…»

Jour 2 :

« La nourriture ? J’ai oublié jusqu’à son goût tellement l’odeur de la mort est partout. La pourriture s’étend partout où je regarde. Les chaotiques ont pris le contrôle de toute la ville. Ils tuent les plus chanceux, et violent les autres. Enfin ceux qui restent sont les sujets d’odieuses expériences des maîtres de la mort. A croire que nous ne sommes que des pantins et des jouets entres leurs mains… »
« J’ai abandonné tout espoir de survivre à cette guerre qui n’est pas mienne. La plupart n’ont d’autre choix que de s’offrir à l’Unique pour ne plus souffrir. J’attends mon tour… J’attends dans la noirceur de la nuit que les faucheurs viennent me récolter… Aucune armure luisant au signe de la Justice ne viendra me sauver. Dans ce monde, il n’y a plus de justice. Seulement le désespoir. Et les fous qui sont bornés et le refusent, ne se promettent qu’une mort de souffrance… »
« Je suis las d’attendre…. Je dois sortir… Je vais sortir… Je sors… »

Jour 3 :

« Les mots me manquent pour d’écrire l’infamie qui règne. La Cité Blanche n’est plus. J’ai connu la puanteur des égouts et la saleté des sentines, mais là c’est tout autre. Mon Dieu, mais qui est-il ? Non qui sont-ils ? Comment avons-nous pu être aussi fous et croire que le Fort les arrêterait ? Leurs armures sont noires, ils… Pardon, ces choses sont plus imposantes que trois hommes réunis. Il n’y a plus rien d’humain… »
« Rampant comme un rat, ce qu’il reste de mon corps décharné admire, d’une certaine manière, ces colosses de métaux, ses enfants du Dieu capable de se jouer de celle que nous avons osé croire forte. Que reste-t-il de nos idéaux face à cette masse, ce prodige ? Déjà en moi la faim se transforme en soif. Je ne la sens plus… je ne les sens plus… »
« Et autour d’eux volent les spectres… Ils aspirent toute vie. Tout espoir. Le froid vient à geler le sang qui coule le long des anciennes rues… Car les temps ont bel et bien changé. Il ne reste rien. C’est la fin du monde… La fin de tout… La Fin… »

Jour 4 :

« S’empare-t-il de moi ? Je me vide de toute vie. L’espoir était une illusion, il ne nourrit rien. Je suis mort. Ils m’appellent… Je dois les rejoindre… Je dois le rejoindre… »
« Toi l’unique,
Je me donne à toi à jamais,
Je suis tiens pour brûler la Baie,
En ce jour mystique, »
« Toi Ananke,
Prend mon corps prend ma vie,
A jamais soyons unis,
Et que nos sangs se taque, »
« Toi le Maître,
Nourris-toi de mon âme,
Nourris-moi de ta lame,
Fais pourrir mon être… »